Le matérialisme historique :
Karl Marx bien qu'influencé par la méthode dialectique de Hegel a pris une autre perspective d'explication de la réalité. Le matérialisme de Marx a rompu avec l'idéalisme de Hegel qui portait sur une dialectique de la pure pensée et idées, tandis que le matérialisme de Marx se voulait une connaissance scientifique de la réalité et du réel dans son mouvement et développement. En d'autres termes, Les idées ne sont pas le moteur de l'Histoire pour Marx, l'Histoire est le produit des forces matérielles. « Karl Marx fonde sa méthode d'analyse de la société sur un double réfus : celui d'expliquer les transformations de la société par les idées, et celui de faire de l'Etat le garant de l‘intérêt général. Il renverse ces deux propositions (d'origine hégélienne) et fait de l'économie la base dont dépendent l'Etat et les idées. D'où le reproche qui lui est fait de réduire les phénomènes sociaux à des phénomènes économiques. »
(Source : Marc Montoussé et Gilles Renouard :100 fiches pour comprendre ma sociologie. 2006). La société est ainsi régulée selon Marx par son mode de production composé par les forces et rapports de production...Il serait judicieux de revenir brièvement sur ces notions marxistes.
Les Forces productives
Les Forces productives sont définies comme étant ‘l'ensemble des ressources matérielles (matières premières, machines et entreprises) et des ressources humaines (la main d'œuvre caractérisée à la fois par le nombre de travailleurs et par leurs qualifications) dont dispose une société' Ibid. On entend donc par forces productives les facteurs de production matérielle regroupant aussi bien la force de travail mobilisée (force physique ou intellectuelle), les outils et instruments de production (machine et technicité) mais aussi les matières premières.
Les rapports de productions
Les rapports de productions sont des outils théoriques marxistes explicatifs des relations entre individus lors de la mise en œuvre des forces productives dont les rapports entre classes sociales en fonction de leurs postures hiérarchique dans le rapport productif comme le rapport d'exploitation des tenants des propriétés sur la classe qui n'a comme propriété que sa force de travail à mettre dans la chaîne de production en se faisant exploiter pour créer une richesse qui se fait transférer à la classe des propriétaires, d'où la naissance de la lutte des classes. « dans la production sociale de leur existence, les hommes entrent en des rapports déterminés, nécessaires, indépendants de leur volonté, rapports de production qui correspondent à un degré de développement déterminé de leurs forces productives matérielles. L'ensemble de ces rapports de production constitue la structure économique de la société, la base concrète sur laquelle s'élève une superstructure juridique et politique et à laquelle correspondent des formes de conscience sociales déterminées. Le mode de production de la vie matérielle conditionne le processus de vie social, politique et intellectuel en général. Ce n'est pas la conscience des hommes qui détermine leur être ; c'est inversement leur être social qui détermine leur conscience. À un certain stade de leur développement, les forces productives matérielles de la société entrent en contradiction avec les rapports de production existants, ou, ce qui n'en est que l'expression juridique, avec les rapports de propriété au sein desquels elles s'étaient mues jusqu'alors. De formes de développement des forces productives qu'ils étaient ces rapports en deviennent des entraves. Alors s'ouvre une époque de révolution sociale. Le changement dans la base économique bouleverse plus ou moins rapidement toute l'énorme superstructure. »
K. Marx, Contribution à la critique de l'économie politique, 1859, p 18.
La somme des forces productives et des rapports de production donne lieu à un mode de production. Les forces productives qui se retrouvent défavorisées sous l'effet du développement d'un mode de production se libèrent pour changer de mode. C'est ainsi que le monde de production esclavagiste a laissé place au mode féodale, ce dernier fut remplacé par le capitalisme (propriété privée des moyens de production).
L'affrontement entre ces classes sociales débouche sur une transformation socio-économique de la société. Dans la société de type capitaliste, les acteurs protagonistes de ces classes sont la classe ouvrière, majorité, contre la classe bourgeoise, une minorité. La classe de la bourgeoise s'enrichit en exploitant la classe ouvrière « : De jour en jour il devient donc plus clair que les rapports de production dans lesquels se meut la bourgeoisie n'ont pas un caractère un caractère simple, mais un caractère de duplicité ; que dans les mêmes rapports dans lesquels se produit la richesse la misère se produit aussi ; que dans les mêmes rapports dans lesquels il y a développement des forces productives il y a une force productive de répression ; que ces rapports ne produisent la richesse bourgeoise, c'est-à-dire la richesse de la classe bourgeoise, qu'en anéantissant continuellement la richesse des membres intégrants de cette classe et en produisant un prolétariat toujours croissant. »
(Karl Marx : Misère de la philosophie, p. 116.)
Super et infrastructure
Le déterminisme social à base économique du marxisme fonde son existence sur des fondations tel un édifice (différents étages). A la base de toute production sociale, on trouve les forces productives ainsi que les rapports de production.
Superstructure | Conscience sociale | idéologies, philosophies, religions, morales... |
Édifice juridique et politique | État, droit, administration | |
Infrastructure (Base Matérielle) | Rapports de production | • Propriété • Classes • Répartition des revenus |
Forces productives | • Moyens de production (matières premières, machines, état des sciences et techniques) • Force de travail (capacités physiques et intellectuelles des travailleurs) |
« Cette infrastructure sociale (constituée par les forces productives et les rapports de production) donne naissance à un édifice juridique et politique, composé par le pouvoir politique, l'appareil d'État, le système juridique, les administrations, etc. Cette infrastructure sociale donne aussi naissance à des formes déterminées de la conscience sociale : les idéologies, les philosophies, les religions, la morale d'une époque ; toutes ces formes de la conscience sociale sont donc le produit de l'infrastructure sociale. L'idéologie est un reflet de l'infrastructure sociale. La conscience sociale est un reflet de l'existence matérielle »
. Ibid, p 28.
Selon Marx, c'est la base économique de l'infrastructure que se fonde la superstructure « l'existence sociale des hommes...détermine leurs consciences »
dit Marx.
L'ETAT & Marx : Marx conçoit l'Etat, contrairement à la tradition hegelienne, comme étant un instrument de domination de la classe exploitée au service de la classe exploitante. Le prolétariat et les salariés deviendront la classe la plus exploité mais aussi la plus nombreuse, Marx prophétise la victoire de cette classe ouvrière réalisera l'Histoire. Au capitalisme se substituerait le socialisme comme mode de production où les forces productives ne seront pas exploitées et que la propriété des moyens de production devient collective. L'évolutionnisme marxiste présage une société sans classes, d'où l'appel adressé par le manifeste du parti communiste dans son dernier paragraphe : « Les communistes ne s'abaissent pas à dissimuler leurs opinions et leurs buts. Ils proclament hautement que ces buts ne pourront être atteints sans le renversement violent de tout ordre social actuel. Que les classes régnantes tremblent à l'idée d'une révolution communiste. Les prolétaires n'ont rien à y perdre, hors leurs chaînes. Ils ont un monde à gagner. Prolétaires de tous les pays, unissez-vous »
. P 43
Travail, la plus-value, Aliénation, accumulation du capital
Le capitaliste (détenteur des moyens de production) achète la force de travail en vue de réaliser une production. La différence entre le cout de la force de travail et la vente de la production dégage le profit. Toutefois, Le salaire avec lequel la force de travail est payé ne correspond qu'à une partie du temps consacré à la production. La journée de travail comporte une période A (période de la force de travail pour la production qui correspond au salaire reçu) tandis que la période B est la période de travail non payé étant accaparée par le détenteur des moyens de production (le capitaliste) : C'est la plus-value, ce qui représente le rapport d'exploitation. La somme des plus-values fonde l'accumulation du capital par le capitaliste tandis que l'ouvrier est payé avec un salaire de subsistance qui ne lui permet par d'accumuler, il vend sa force de travail.
Journée de travail = Entretien de la Force de travail (A) + Plus-value (B)
L'aliénation dans une acception plus large peut être opérée par le mythe ou la juridiction (la religion et l'Etat). L'aliénation par le travail Le travail qui ne permet l'émancipation de l'individu mais bien au contraire, on lui vole le produit de son travail pour la richesse des autres fonde l'aliénation de Marx. Le travail devient ainsi une marchandisation à vendre en détruisant l'ouvrier, car ce dernier ne possède ni l'outil de son travail ni sa production, son travail est une forme d'aliénation car il y a extériorisation du travail échangé contre une transaction salariale qui ne lui appartient plus, lui devient étrange. L'aliénation chez Marx a été détaillée et défini dans les Manuscrits de 1844, ‘économie politique et philosophique'.
« Ce fait n'exprime rien d'autre que ceci : l'objet que le travail produit, son produit, l'affronte comme un être étranger, comme une puissance indépendante du producteur. Le produit du travail est le travail qui s'est fixé, concrétisé dans un objet, il est l'objectivation du travail. L'actualisation du travail est son objectivation. Au stade de l'économie, cette actualisation du travail apparaît comme la perte pour l'ouvrier de sa réalité, l'objectivation comme la perte de l'objet ou l'asservissement à celui-ci, l'appropriation comme l'aliénation, le dessaisissement... L'appropriation de l'objet se révèle à tel point être une aliénation que plus l'ouvrier produit d'objets, moins il peut posséder et plus il tombe sous la domination de son produit, le capital... L'aliénation de l'ouvrier dans son produit signifie non seulement que son travail devient un objet, une existence extérieure, mais que son travail existe en dehors de lui, indépendamment de lui, étranger à lui, et devient une puissance autonome vis-à-vis de lui, que la vie qu'il a prêtée à l'objet s'oppose à lui, hostile et étrangère »
. P 57
L'aliénation est donc un processus de perversion des valeurs où « l'ouvrier devient d'autant plus pauvre qu'il produit plus de richesse, que sa production croît en puissance et en volume. L'ouvrier devient une marchandise d'autant plus vile qu'il crée plus de marchandises. La dépréciation du monde des hommes augmente en raison directe de la mise en valeur du monde des choses. Le travail ne produit pas que des marchandises ; il se produit lui-même et produit l'ouvrier en tant que marchandise, et cela dans la mesure où il produit des marchandises en général »
. P 56