Aperçu des sections

  • Présentation du cours

    Auteur : Kheniche Redouane, Maitre-assistant,

                  Département de français,

                  Université de Béjaia

    Contact : Redouane.Kheniche@univ-bejaia.dz

    Module : Phonétique 2

    Domaine : Linguistique

    Objectifs : Analyser la structure phonétique du français

    Objectifs spécifiques :

    1. Identifier les phonèmes du français
    2. Classer les phonèmes du français
    3. Décrire et expliquer la variation des phonèmes du français

    Public ciblé : Etudiant de 2ème année, licence de français

    Pré-requis : Savoir transcrire en API (Passer le test)

                        Connaitre les caractéristiques articulatoires                         des phonèmes du français.

     

  • Programme du cours

    I. Repères théoriques

    1. De la linguistique à la phonétique
    2. La double articulation
    3. Le phonème
    4. En marge de la double articulation

    II. L'identification des phonèmes

    1. La segmentation
    2. La commutation

    III. Le classement des phonèmes

    1. Les traits pertinents
    2. Le trait distinctif

    IV. La variation des phonème

    1. Les variantes libres

    i. La variation géographique
    ii. La variation sociale

    2. Les variantes contextuelles

    i. La chute de sons
    ii. L'assimilation

    V. La prosodie

    1. La syllabe
    2. L'accentuation
    3. L'intonation

    VI. Phonétique appliquée

    1. Acquisition et troubles phonétiques du langage
    2. Le traitement automatique des langues naturelles : la synthèse vocale avec les logiciels Praat et Mbrola

    • I. Repères théoriques

      1.     De la linguistique à la phonologie :

      La linguistique est la science qui étudie la langue. Elle est composée de 4 branches : la phonologie, la lexicologie, la morphosyntaxe et la sémantique.

      La phonologie est donc la branche de la linguistique qui étudie les sons d’une langue.

      2.     La double articulation du langage :

      C’est une organisation du langage humain selon laquelle tout énoncé s’articule sur deux plans. Au niveau de la première articulation, l’énoncé s’articule linéairement en unités douées de sens qu’on appelle morphèmes. Au niveau de la deuxième articulation, chaque monème s’articule à son tour en unités plus petites et non significatives appelées phonèmes.

      3.     Le phonème :

      C’est l’élément distinctif minimal, non segmentable et dépourvu de sens de la représentation phonologique d’un énoncé. Sa nature est déterminée par un ensemble de traits pertinents. Il est noté entre barres obliques « // ».

      4.     En marge de la double articulation

      Il y a des faits linguistiques qui ne se conforment pas au principe de la double articulation, comme les variations mélodique accompagnant les énoncés affirmatif, interrogatif et exclamatif. Ces phénomènes appelés « supra segmentaux » forment un chapitre de la phonologie intitulé « prosodie », distinct de la phonématique où l’on traite des phonèmes.

      5.     Phonétique Vs phonologie :

      La phonétique est la science qui étudie les sons du langage humain du point de vue de leur production (phonétique articulatoire), de leur transmission (phonétique acoustique) et de leur réception (phonétique auditive).

      Par contre, la phonologie est la discipline qui étudie les sons du langage du point de vue de leur fonction dans le système de communication linguistique.

      Partant de cette distinction entre la phonologie et la phonétique, on peut affirmer que la phonétique relèverait d’une linguistique de la parole, et que la phonologie relèverait quant à elle de la linguistique de la langue. C’est pour cela que certains spécialistes avancent que la phonétique ne relève même pas de la linguistique.

      Plus concrètement, en prenant comme exemple les sons [r] vibrante dentale dit « r bourguignon », le [R] vibrante uvulaire dit « r grasseyé » et le [?] fricative uvulaire dit « r parisien », la phonétique les étudiera comme des sons complètement différents ; à l’opposé, la phonologie les considèrera, du point de vue de leur fonction dans la langue française, comme trois variantes d’une seule et même réalité phonologique qui est le [R] car leur fonction est la même.

      • II. Les branches de la phonologie

        Pour rappel, la phonologie est la discipline scientifique qui étudie les phonèmes d’un système de communication linguistique donné du point de vue de leurs fonctions. La phonologie s’organise en deux champs d’investigation : la phonématique et la prosodie.

        1.     La phonématique : 

        C’est la branche de la phonologie qui étudie les phonèmes. L’objectif de la phonématique est de dégager l’inventaire des phonèmes d’une langue donnée, de les classer et d’étudier leurs combinaisons.

        a.      L’identification des phonèmes

        Pour identifier les unités d’une langue (phonème, morphème) et décrire les lois qui régissent leurs combinaisons on utilise l’analyse distributionnelle.

        L’analyse distributionnelle est la méthode d’analyse caractéristique de la linguistique structurale. Elle est apparue aux USA vers 1930. Cette méthode fait appel à l’étude des environnements des unités (ce qui précède et ce qui suit) pour faire ressortir des oppositions qui peuvent être d’ordre syntagmatique ou d’ordre paradigmatique.

        Pour cela, on utilise deux opérations : La segmentation et la commutation.

        i. La segmentation :

        La segmentation est une procédure consistant à segmenter l’énoncé, c'est-à-dire à le diviser en morphèmes, qui seront à leur tour segmentés en unités constituantes, les phonèmes. Cette opération précise la classification des unités selon les rapports syntagmatiques qu’elles entretiennent. La segmentation est indissociable de la commutation.

        ii. La commutation :

        La commutation est le test qui permet d’identifier les phonèmes qui composent un énoncé, par le remplacement d’un son par un autre sur l’axe paradigmatique. Si la commutation entraine une différence de signification, on dira que le son dégagé est un phonème.

        Ex : Quels sont les phonèmes qui composent le morphème « père » ?

        Segmentation : /p /ɛ/ R/.

        Commutation du premier son [p] par [m] On obtient : /m ɛ R/. La commutation a entrainé une différence de signification, donc /p/ est un phonème.

        Commutation du son [ɛ] par le son [a]. On obtient : /paR/. La commutation a entrainé une différence de signification, donc /ɛ/ est un phonème.

        Commutation du dernier son [R] par le son [l]. On obtient : /pɛl/. La commutation a entrainé une différence de signification, donc /R/ est un morphème.

        • b. Les traits pertinents et le trait distinctif

          Le phonème est constitué dans sa substance sonore par un faisceau de traits phoniques. Ces traits peuvent être, en principes, définis aux différents stades de la transmission du message : articulatoire, acoustique et auditif. Cependant, et en l’absence de tout matériel expérimental, les linguistes préfèrent utiliser les traits phoniques articulatoires puisqu’ils permettent une vérification plus aisée.

          Le phonème /m/ par exemple est caractérisé par les traits phoniques suivants : bilabial, nasal, sonore, occlusif.

          1. i.     Les traits pertinents : ce sont tous les traits phoniques qui permettent l’identification du message. Selon Jakobson, tous les systèmes phonologiques du monde reposent sur une douzaine d’oppositions binaires dans lesquelles chaque langue opère un tri.

          Les consonnes du système phonologique du français recours au moins aux traits pertinent suivants : oralité/nasalité ;  occlusion/constriction ; sonorité/surdité ; point d’articulation.

          1. ii.   Le traits distinctif : On appelle trait distinctif le trait pertinent capable d’opposer deux énoncés de sens différents dont le signifiant est par ailleurs identique.

          En français, le trait distinctif qui oppose le mot « pain » au mot « bain » et le voisement (sonorité/surdité) des initiales /p/ et /b/ :

          Le phonème /p/ est sourd, occlusif, oral et bilabial.

          Le phonème /b/ est sonore, occlusif, oral et bilabial.

          Dans ce cas, « pain » et « bain » forment une paire minimale. La paire minimale est une paire de mot ayant un sens différent et dont le signifié ne diffère que par un phonème.

          • 3. La variation

            La variabilité des réalisations phoniques constitue une particularité importante de la parole. La parole peut se manifester de façon très variable pour diverses raisons. Parmi les variations possibles, il faut distinguer celles qui résultent des erreurs de production et des pathologies du langage, ou encore celles liées aux différences entre l’état des locuteurs comme la fatigue, la joie, la tristesse …etc. Ce type de variations, dites « individuelles », n’est pas lié aux principes d’organisation phonologique de la langue.

            Les variations phonologiques qui nous intéressent sont de deux types : les variations libres et les variations contextuelles.

             

            1. 1.   Les variantes libres : on parle de variation libre si deux phonèmes figurent dans le même environnement phonématique, et s’ils peuvent être substitués l’un à l’autre sans qu’il y ait une différence dans le sens du mot, on dira alors que les deux phonèmes sont des variantes libres d’un même et unique phonème.

            Ce premier type de variation est généralement dû à deux facteurs :

            1. a.   Le facteur géographique (régional) : l’origine géographique des locuteurs détermine souvent ses choix linguistiques et l’utilisation d’une variante phonologique au dépend d’un autre.

            Il y a, par exemple, en français un seul phonème /R/ qui est réalisé de deux manières différentes selon les régions. On a le [r] vibrante dentale dit « bourguignon » qui est plutôt réalisé dans le sud de la France, et le [ʁ] fricative uvulaire dit « parisien » car propre à la communauté parisienne.

            Autre exemple. Ainsi en Alsace, [b] et [v] sont souvent prononcés [p] et [f] sous l'influence du substrat germanique.

            On dira que dans le premier exemple, le [r] et le [ʁ] sont des variantes régionales du phonème [R].

            1. b.   Le facteur social : l’origine socioéconomique, l’identité, l’âge ou le sexe d’un locuteur intervient dans le choix d’une variante phonologique au détriment d’une autre. En prenant le même phonème [R] et sa variante [r] dans le contexte sociolinguistique algérien, certaines études démontrent que les femmes utilisent plus souvent la variante [R] que les hommes. Ces études mettent en évidence aussi le fait que l’utilisation du [R] est souvent rattachée à une certaine idée du prestige accordé à la langue française.

            Autre exemple. Labov, sociolinguiste américain, a montré dans une étude que la prononciation du phonème [r] différait en fonction de la classe sociale des locuteurs, en ce sens que ce phonème était plus prononcé chez les new yorkais issus de la classe aisée. En revanche, chez les classes les moins aisées, l’insistance sur la prononciation des [r] est dans bien des cas presque inexistant.

             

            1. 2.   Les variantes contextuelles : Lorsque les sons d'une langue se trouvent en contact dans la  chaîne  parlée, de  nombreuses modifications  peuvent se  produire,  dues à différents types d'interaction articulatoire. Comme plus fréquentes nous pouvons citer les chutes (ou élisions) de sons et les assimilations.
            2. a.   Chute des sons : Par chute ou élision d’un son nous entendons sa disparition complète. L’élision est souvent due à une sorte de paresse articulatoire qui fait que le locuteur « omet » volontairement l’articulation d’un son.

            Exemple : La chute du /t/ dans « maintenant » /mɛ̃nã/

            Le phonème /ə/ dit caduc subit souvent cette élision : /ʒənsɛpa/ « je ne sais pas »

            1. b.   L’assimilation : c’est un processus universellement attesté qui peut se définir comme l’acquisition d’un trait  phonique par un  son à  partir d’un son  immédiatement  voisin.

            Ex : on dit qu’il y a assimilation dans le mot « journalisme » /ʒuRnalis̬m/ parce que le phonème /s/ prend l’une des caractéristiques du /m/ avec lequel il se trouve en contact. Le trait phonique transmis au /s/ est le voisement du /m/. Le /s̬/ n’est pas totalement voisé pour devenir un /z/.

            Ce phénomène, lié sans doute à la lenteur des organes de la parole (donc à des contraintes d’ordre physiologique), se manifeste soit par une anticipation soit par un retardement de geste(s) articulatoire(s.

            • 2. la prosodie

              1. La prosodie : C’est la branche de la phonologie qui étudie les phénomènes linguistiques qui échappent au principe de la double articulation et à la segmentation. Les phénomènes, suprasegmentaux que l’on va voir dans ce qui suit sont l’accentuation et l’intonation.

              Mais avant, il nous faudra passer par la notion de syllabe, qui est l’élément centrale dans toute approche prosodique.

              2. La syllabe : c’est une unité linguistique relativement facile à appréhender pour les locuteurs. On considère traditionnellement qu’il y a dans une séquence autant de syllabes qu’il y a de voyelles. La syllabe est généralement formée autour d’une voyelle. Autour de cette voyelle centre de syllabe se groupent éventuellement des consonnes. En conséquence, on aura comme structure de syllabe le schéma suivant : Cm V Cn, où m = 0 à 4 et n = 0 à 3 (nombre de consonnes). La position Cm est la position forte, la position Cn est la position faible.

              3. L’accentuation : L’accentuation peut se manifester de plusieurs façons : par une augmentation de durée, un changement important de mélodie, un accroissement d’intensité. Les deux premiers paramètres sont ceux que l’on rencontre le plus fréquemment en français standard. L’accentuation est donc fixe et prévisible en français, elle atteint généralement la dernière syllabe du mot ou du syntagme. Sa fonction est démarcative ou contrastive.

              3.1 L’accent démarcatif : Placé en fin de mot ou de syntagme il permet de délimiter les différentes unités d'un énoncé qu’on appelle un groupe rythmique. Le rythme varie selon le débit, car plus on parle vite, moins il y a de pauses et d'accents.

              Exemple :

              La locomotive : s’est arrêtée : dans la gare :.

              Les enfants :, épuisés :, s'endorment dans le train:/ Et si on mangeait, les enfant.

              Les frontières des groupes rythmiques coïncident en règle générale avec des frontières syntaxiques importantes.

              3.2. L’accent d’insistance : Celui-ci  relève de  l’expressivité. Sa fonction : la mise en relief d’un élément de l’énoncé, une focalisation. Elle frappe le plus souvent la première syllabe de l’unité  linguistique sur  laquelle on veut insister, et se manifeste sous différentes formes : accroissement de la durée de cette syllabe ou de  la première consonne, attaque dure en cas d’initiale vocalique et montée de la mélodie.

              Ex : C’est la : vérité.

              4. L’intonation : C’est la structuration mélodique des énoncés en groupes rythmiques. Les modulations sont provoquées par des changements de hauteur dans la courbe mélodique. L’intonation peut être descendante puis montante dans le cas de l’interrogation :

            • ENTRAINEMENT