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  • La variabilité des réalisations phoniques constitue une particularité importante de la parole. La parole peut se manifester de façon très variable pour diverses raisons. Parmi les variations possibles, il faut distinguer celles qui résultent des erreurs de production et des pathologies du langage, ou encore celles liées aux différences entre l’état des locuteurs comme la fatigue, la joie, la tristesse …etc. Ce type de variations, dites « individuelles », n’est pas lié aux principes d’organisation phonologique de la langue.

    Les variations phonologiques qui nous intéressent sont de deux types : les variations libres et les variations contextuelles.

     

    1. 1.   Les variantes libres : on parle de variation libre si deux phonèmes figurent dans le même environnement phonématique, et s’ils peuvent être substitués l’un à l’autre sans qu’il y ait une différence dans le sens du mot, on dira alors que les deux phonèmes sont des variantes libres d’un même et unique phonème.

    Ce premier type de variation est généralement dû à deux facteurs :

    1. a.   Le facteur géographique (régional) : l’origine géographique des locuteurs détermine souvent ses choix linguistiques et l’utilisation d’une variante phonologique au dépend d’un autre.

    Il y a, par exemple, en français un seul phonème /R/ qui est réalisé de deux manières différentes selon les régions. On a le [r] vibrante dentale dit « bourguignon » qui est plutôt réalisé dans le sud de la France, et le [ʁ] fricative uvulaire dit « parisien » car propre à la communauté parisienne.

    Autre exemple. Ainsi en Alsace, [b] et [v] sont souvent prononcés [p] et [f] sous l'influence du substrat germanique.

    On dira que dans le premier exemple, le [r] et le [ʁ] sont des variantes régionales du phonème [R].

    1. b.   Le facteur social : l’origine socioéconomique, l’identité, l’âge ou le sexe d’un locuteur intervient dans le choix d’une variante phonologique au détriment d’une autre. En prenant le même phonème [R] et sa variante [r] dans le contexte sociolinguistique algérien, certaines études démontrent que les femmes utilisent plus souvent la variante [R] que les hommes. Ces études mettent en évidence aussi le fait que l’utilisation du [R] est souvent rattachée à une certaine idée du prestige accordé à la langue française.

    Autre exemple. Labov, sociolinguiste américain, a montré dans une étude que la prononciation du phonème [r] différait en fonction de la classe sociale des locuteurs, en ce sens que ce phonème était plus prononcé chez les new yorkais issus de la classe aisée. En revanche, chez les classes les moins aisées, l’insistance sur la prononciation des [r] est dans bien des cas presque inexistant.

     

    1. 2.   Les variantes contextuelles : Lorsque les sons d'une langue se trouvent en contact dans la  chaîne  parlée, de  nombreuses modifications  peuvent se  produire,  dues à différents types d'interaction articulatoire. Comme plus fréquentes nous pouvons citer les chutes (ou élisions) de sons et les assimilations.
    2. a.   Chute des sons : Par chute ou élision d’un son nous entendons sa disparition complète. L’élision est souvent due à une sorte de paresse articulatoire qui fait que le locuteur « omet » volontairement l’articulation d’un son.

    Exemple : La chute du /t/ dans « maintenant » /mɛ̃nã/

    Le phonème /ə/ dit caduc subit souvent cette élision : /ʒənsɛpa/ « je ne sais pas »

    1. b.   L’assimilation : c’est un processus universellement attesté qui peut se définir comme l’acquisition d’un trait  phonique par un  son à  partir d’un son  immédiatement  voisin.

    Ex : on dit qu’il y a assimilation dans le mot « journalisme » /ʒuRnalis̬m/ parce que le phonème /s/ prend l’une des caractéristiques du /m/ avec lequel il se trouve en contact. Le trait phonique transmis au /s/ est le voisement du /m/. Le /s̬/ n’est pas totalement voisé pour devenir un /z/.

    Ce phénomène, lié sans doute à la lenteur des organes de la parole (donc à des contraintes d’ordre physiologique), se manifeste soit par une anticipation soit par un retardement de geste(s) articulatoire(s.